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LE PIC PÉTROLIER PEUT-IL CONTRIBUER À EVITER UN SCÉNARIO EXTREME DE RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE?
Patrick Brocorens  1, 2@  
1 : Université de Mons - UMONS (BELGIQUE)  (UMONS)  -  Site web
20, place du parc, 7000 Mons -  Belgique
2 : Section belge de l'Association for the Study of Peak Oil and gas  (ASPO.be)  -  Site web
19, avenue Victor Maistriau, 7000, Mons -  Belgique

 

L'exploitation et l'utilisation des énergies fossiles contribuent aux émissions de gaz à effet de serre (GreenHouse Gases, GHG) à hauteur de 62% sous forme de CO2 libéré lors de la combustion, et environ 8% sous forme de méthane et de protoxyde d'azote. En tout, ce sont environ 70% des émissions de GHG qui peuvent être liées à l'utilisation des énergies fossiles[1]. Les énergies fossiles occupent et continueront à occuper pour longtemps une position dominante dans l'approvisionnement énergétique, mais des contraintes à la production de nature physique et économique existent. En particulier, la production de pétrole est la première des production de ressources carbonées fossiles (pétrole, gaz, charbon) a être gênée significativement par ces contraintes croissantes, qui la conduisent inexorablement vers un pic, puis un long déclin. Les années postérieures à 2004 ont été marquées par le plafonnement de la production de pétrole conventionnel. Ce phénomène bien peu anticipé a entraîné une forte hausse du cours du baril, et permis le développement des pétroles de roches mères aux Etats-Unis. Le pic du pétrole conventionnel annonce cependant un pic tous pétroles dans un avenir relativement proche.

 

Le but de ce document est d'aborder l'effet que les contraintes à la production des énergies fossiles et un pic pétrolier précoce peuvent avoir sur les émissions de CO2, et les prévisions de changements climatiques modélisées par le GIEC à partir de ces émissions.

 

Cette étude se base sur les perspectives de production suivantes, où les contraintes envisagées font abstraction de toute mesure climatique:

 

  • Gaz naturel : scénario de Jean Laherrère, jusque 2050[2] ;

  • Pétrole : moyenne d'une enquête Delphi auprès d'experts pétroliers, jusque 2050[3] ;

  • Charbon : scénario BP jusque 2030, suivi d'un plateau de production jusque 2050[4].

 

Les trajectoires d'émissions correspondantes ont été comparées à différents scénarios de référence du GIEC, c.à-d. sans mesure climatiques, mais aussi à des scénarios d'atténuation et de stabilisation du GIEC[5].

 

Les scénarios de l'IEA (International Energy Agency)[6] ont également été comparés. Ces scénarios ont toute leur place ici car l'IEA convertit ses projections de production de pétrole, gaz et charbon en émissions de CO2 et en augmentations de températures correspondantes par rapport aux niveaux préindustriels. En particulier, l'IEA a établi un scénario, dit Scénario 450, correspondant à un monde où des mesures fortes seraient prises pour avoir 50% de chance de limiter à 2°C l'augmentation à long terme des températures. Le scénario 450 présente non seulement une trajectoire globale d'émission de CO2 d'énergies fossiles, mais également une trajectoire pour chaque énergie fossile. Ces trajectoires d'émissions de CO2 ont été comparées avec celles considérées dans cette étude, afin d'évaluer l'effort éventuel à faire par énergie fossile pour se rapprocher du scénario 450 de l'IEA.

 

Les comparaisons entre scénarios ne s'étendent que jusqu'en 2050 (ou 2035 pour les scénarios de l'AIE), mais certaines tendances se dessinent au niveau des trajectoires d'émissions. Les contraintes à la production des énergies fossiles font que les scénarios les plus élevés d'émissions de CO2 utilisés dans les études du GIEC resteront hors d'atteinte. Cependant, on n'atteint pas non plus l'objectif d'avoir 50% de chance de maintenir les hausses de température à moins de 2 °C sur le long terme, qui requiert une stabilisation des GHG à 450 ppm CO2-q dans l'atmosphère6. On se situerait plus vraisemblablement vers le milieu des scénarios de stabilisation du GIEC, soit 535-710 ppm CO2-eq, et 2.8-4.0°C d'augmentation des températures sur le long terme[7]. Si on se base sur le scénario 450 de l'IEA comme référence parmi les possibles scénarios de stabilisation à 450 ppm CO2-q, on constate que c'est principalement les émissions de charbon qui conduisent à dévier de l'objectif de 450 ppm CO2-q.  

 

Le pic pétrolier peut donc jouer un rôle dans la réduction des émissions de GHG – la trajectoire de production du pétrole est compatible avec la trajectoire qui lui est attribuée dans le scénario 450 de l'IEA, et ce sans mesure politique de réduction de la production – mais il est à lui seul insuffisant pour atteindre des objectifs climatiques ambitieux. D'autre part, si le pic pétrolier devait arriver par surprise (par manque d'anticipation), l'évolution des prix des énergies fossiles et de la situation économique prendront vraisemblablement le pas sur les objectifs climatiques dans les décisions politiques.

 

 

 

 

 

 

 


[1] M. Höök et X. Tang, Depletion of fossil fuels and anthropogenic climate change – A review, Energy Policy 52, 797-809, 2013.

[2] Jean Laherrère, CLARMIX, Prévisions pétrole et gaz 1900-2100, 22 octobre 2013, http://aspofrance.viabloga.com/files/JL_Clarmix-Previsions1900-2100.pdf

[3] CLARMIX, Enquête Delphi sur les prévisions de pétrole auprès des membres d'ASPO France et de membres extérieurs, 2013, communication privée.

[4] BP Energy Outlook 2030, 2013.

[5] Rapports du GIEC: Special Report on Emission Scenario, 2000; third assessment report, 2001; fourth assessment report,2007; et fifth assessment report, 2014.

[6] International Energy Agency, WEO2012.

[7] Fourth assessment report, IPCC, 2007

 



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